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Les personnages dans « Tamango »

Ayché, l’épouse fidèle

Portrait d'une négresse, Marie-Guillemine Benoist  Sa présentation est brève : elle est une des « deux femmes » de Tamango, sans doute la plus « jolie » à en juger par sa volonté de la retrouver, et par les « hautes fonctions » auxquelles l’emploie le capitaine Ledoux. Mérimée reprend pour elle l’image traditionnelle que le XIX° siècle se fait de la femme africaine, mélange de superstition et de soumission. Ainsi elle manifeste une véritable « terreur » en entendant les menaces de Tamango fondées sur la légende de Mama-Jumbo, empruntée par Mérimée à Voyage à l’intérieur de l’Afrique, récit de l’explorateur anglais, Mungo Park. Mais aussi sa première phrase à Tamango est « Pardonne-moi », et ses derniers mots sont aussi des mots de regret et de sacrifice. S’agit-il seulement de peur : elle « n’osait lui adresser la parole » ? Ou bien ressent-elle un amour sincère, qui s’exprime par une adoration soumise lorsque Tamango lui tend la main et qu’elle « la baisait à genoux devant lui » ?   

=== Mérimée fait d’elle une héroïne attachante, et son rôle est essentiel puisqu’elle est à la fois l’élément perturbateur du récit, et l’élément de résolution, par la lime qu’elle procure à Tamango. Elle apporte à ce récit la touche féminine propre à émouvoir le lecteur.

Ledoux, le capitaine négrier

La présentation du personnage, dans l’incipit, le montre comme un marin expérimenté et courageux. Il a toutes les qualités attendues par les armateurs qui l’emploient : des compétences nautiques car le capitaine devait savoir naviguer mais aussi échapper aux croiseurs anglais ennemis. Mais il y joint des compétences commerciales, car il sait marchander avec les traitants africains. Enfin il doit avoir des compétences de manieur d’hommes avec son équipage mais aussi pour garder les esclaves.

L'affiche du film      Mais c’est surtout un négrier sans scrupules. Son tempérament est l’inverse de son nom, car il ne cesse de faire preuve de violence, toujours prêt à frapper et à s’en faire gloire, les femmes, la sienne aussi bien qu’une esclave telle Ayché, comme les hommes, son équipage comme les esclaves, avec « son terrible fouet » : « je lui ferai si bien ratisser l’échine, que son cuir, de noir, deviendra rouge comme un rosbif crû. » Cette violence lui permet de se lancer sans hésiter dans le combat lors de la révolte des esclaves, et de se réjouir par avance de tuer Tamango : « Ledoux, avec un sourire diabolique, levait le bras et allait le percer. »

Le combat du capitaine  Pour lui les Noirs ne sont que des marchandises, et l’essentiel est d’obtenir le plus fort bénéfice. On notera l’ironie du narrateur à ce propos quand il mentionne par exemple  son esprit moderne, ouvert aux techniques nouvelles, « les caisses en fer » pour l’eau ou « les menottes et les chaînes » préservées « de la rouille ». Il se livre à de savants calculs pour embarquer « une dizaine de Nègres de plus qu’un autre », en ne leur laissant qu’un mètre de hauteur « pour s’ébattre ». Son cynisme éclate dans sa phrase, « les Nègres, après tout, sont des hommes comme les autres », ou lors de ses calculs sur « la compressibilité des corps humains », pour entasser quelques esclaves de plus à  bord. On le retrouve dans la scène de danse sur le pont à travers sa phrase cruelle : « Allons, mes enfants, dansez, amusez-vous. » 

Tamango, du grotesque au tragique

L’Afrique devient à la mode au XIX° siècle, mais quelle Afrique ? Deux images co-existent : celle d’une terre primitive, imprégnée de superstition, où règne la sorcellerie, et celle d’une terre sauvage, royaume d’animaux féroces, lions et panthères. C’est cette double image qu’illustre le héros, alliant le grotesque au tragique.

    Le héros dérisoire   Africain primitif, Tamango a succombé, en effet, aux illusions que les Occidentaux ont apportées en Afrique : la « richesse » facilement acquise par la Traite lui permet d’obtenir ces biens enviables que sont les armes, les objets  ou les vêtements européens, sans compter l’eau-de-vie qui aide les transactions. Ainsi son portrait insiste sur son habit ridicule, dont il tire sa gloire. Primitif lui-même, il sait user de ruse pour manipuler ceux qu’il a jetés dans l’esclavage, en faisant appel à leur peur (Mama-Jumbo), ou à leurs croyances. Il les met ainsi à son service, pour récupérer son épouse Ayché. Il est en fait  l’égal, en cynisme et en violence, de son rival, Ledoux : ivre, il n’hésite pas à tirer sur une mère pour « un petit verre d’eau-de-vie » Enfin, incapable d’avouer ses ignorances, par exemple pour conduire le navire, il adopte des attitudes théâtrales, qui ne font que souligner sa vanité. Le dénouement nous ramène à cette vision grotesque : loin d’avoir gagné sa liberté, il est devenu l’amuseur des Blancs, « cymbalier » du régiment, grand amateur de « rhum et de tafia », fin bien dérisoire pour un guerrier africain. 

 Mais Mérimée, par opposition, met aussi en évidence une forme de grandeur et de noblesse de son héros. Lorsqu’il comprend qu’Ayché est perdue par sa faute, Mérimée montre la douleur du « pauvre Tamango », sincère même si elle est très théâtrale, et « la résistance du Noir fut héroïque » écrit Mérimée, qui met en relief la valeur de ce guerrier


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